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Gustave Falconnier in Les Arts et l'Industrie du Verre
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Les Arts et l'Industrie du Verre, front cover
Henry d'Ancy · 1899

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 140

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 141

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 142

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 143

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 145

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 146

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 147

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 148

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 149

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 150

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 151

Les Arts et l'Industrie du Verre, page 152
CHAPITRE VII

Le Verre et l'Architecture.

Le progrès et la verrerie. — Les vitres constituent le premier emploi du verre dans l'architecture. — Les serres. — Les jardins d'hiver. — Le Palais de Cristal, à Londres. — Les toitures vitrées. — Les vitres coulées. — Les vitres coulées en relief. — Le verre armé. — Les dalles en verre. — Les cheminées de verre. — Le maison de verre de M. Garnier. — La maison du docteur Van der Heyden. — Les tables et les guéridons en verre. — Les rideaux de verre.

L'homme est ingénieux; les secrets qu'il arrache à la nature, il s'efforce d'en tirer toujours de nouvelles applications, afin d'augmenter son bienêtre. Dans cette voie il ne s'arrêtera pas: quand bien même il atteindrait un degré de confortable cent fois plus élevé que celui auquel il est déjà parvenu, il ne resterait pas encore en repos. L'activité est dans le fond même de sa nature; il semble destiné à aller toujours en progressant.
Bien différent, soit dit en passant, est l'animal. Il est resté stationnaire, au milieu des merveilles enfantées par le génie humain. Jamais il n'a fait reculer d'un pouce les limites dans lesquelles la nature a parqué sa rudimentaire activité.
Dès les temps les plus reculés, l'homme a trouvé le verre. Il en a fait tout d'abord un objet de luxe: cela ne lui a pas suffi. Perfectionnant ses méthodes, ses procédés industriels, il est arrivé à fabriquer le verre à bon compte, à le rendre accessible à tous, à en répandre l'emploi dans les usages les plus ordinaires de la vie. Aujourd'hui, le verre est devenu indispensable. Il semble que l'application devait s'arrêter là: il n'en a rien été. En notre siècle, si fécond en inventions utiles, la science n'a jamais dit son dernier mot. Telle idée qui aurait paru paradoxale il y a un siècle, est devenue banale à force d'être entrée dans les faits. Le progrès devait ouvrir encore au verre de nouveaux horizons.
Qu'auraient dit nos pères, en effet, s'ils avaient pu prévoir que cette substance essentiellement fragile serait un jour employée dans la construction, à l'égal des pierres de taille? Ce prodige, notre siècle en a été le témoin. Jadis on disait: briser comme verre; l'industrie moderne a fait mentir la sagesse des nations.
Je m'arrête: en chantant les louanges de notre époque, je risque de calomnier les temps passés. Mes lecteurs pourraient croire que le XIXe siécle a le premier songé à faire entrer le verre dans l'architecture: rendons justice à nos pères, de qui nous tenons en somme les premiers rudiments de ces sciences dont nous sommes si fiers! Nous n'avons fait que développer ce qu'ils avaient déjà commencé: mais ces développements, il faut le reconnaître, ont dépassé tout ce qu'ils auraient pu imaginer.
L'architecture? Mais il y a longtemps qu'elle s'est pour la première fois laissé envahir par le verre! Qu'est-ce que la vitre, sinon le premier essai tenté pour faire entrer le verre dans la construction des édifices? Destinée tout d'abord à préserver les appartements du froid, tout en permettant à la lumière d'y pénétrer, elle a revêtu au moyen âge un caractère artistique dans l'architecture religieuse: elle est devenue le vitrail.
Les vitres, après tout, sont, sans les édifices, des portions de la façade. Pourquoi ne formeraient-elles pas à elles seules la façade entière? Pourquoi ne pas supprimer la pierre, le plâtre ou le bois? C'est ce que l'on a fait pour certaines constructions, destinées à abriter en hiver les plantes délicates, qui one besoin de la bienfaisante lumière solaire, mais qui ne peuvent vivre en plein air dans la saison rigoureuse. Le serre est un des principaux spécimens dans constructions de verre. Elle est formée de vitres enchâssées dans une sorte de carcasse en fer.
Jadis la serre était reléguée dans un coin reculé du jardin, souvent dans le potager. Aujourd'hui, il y a serre et serre, l'une sérieuse, destinée à renfermer les plantes que l'on veut soigner en hiver; l'autre servant au decorum, à l'ornementation de la maison. Celle-ci est une véritable succursale du salon; remplie de plantes exotiques, agréablement meublée, elle constitue ce qu'on appelle le jardin d'hiver. Elle contribue à donner aux réceptions, aux réunions mondaines un charme incomparable, grâce à l'éclat eu au parfum délicieux des fleurs qu'elle abrite.
Jardin d'hiver construit en briques de verre soufflé
Jardin d'hiver construit en briques de verre soufflé
Pourquoi s'arrêter en si beau chemin? Il n'est pas plus difficule de faire de vastes constructions en verre que d'édifier des serres de dimension restreinte pour les plantes. En 1851, à l'Exposition de Londres, on a élevé un immense bâtiment tout en verre, pompeusement appelé Palais de Cristal, et qui n'est guère qu'une serre gigantesque. Il est formé d'une multitude de vitres enchâssées dans de la fonte. Il ne mesure pas moins de six cents mètres de longueur. Trente-trois mille colonnes de fonte soutiennent tout l'édifice.
Au fond, ce palais n'est pas une merveille; c'était, comme on dirait aujourd'hui un clou pour l'Exposition de Londres, destiné à attirer les étrangers, comme le tour Eiffel en 1889, à l'Exposition de Paris, et la lune à un mètre que quelques farceurs nous ont promise pour 1900. Ce n'est pas là qu'il faut regarder pour trouver un progrès sensible dans l'application du verre à l'architecture.
Si vous êtes entré dans des administrations, des banques, des caisses publiques, n'avez-vous pas remarqué que souvent la toiture des vastes halls où l'on reçoit le public est tout entière faite de vitres? Ce sont parfois d'anciennes cours intérieures, que l'on a ainsi converties en salles. La lumière y pénètre abondamment; c'est un grand avantage; mais j'avoue que j'ai plus d'une fois plaint les employés, obligés de passer leur vie, dans les mois caniculaires, au fond de ces cages de verre, comme en serre chaude. Le soleil est une très bonne chose; mais en plein été on aime à s'en garer.
Dans ce même ordre d'idées, je citerai les gares de chemin de fer, les usines; l'industrie moderne, en réunissant dans un même établissement des armées de travailleurs, a nécessité la construction de hangars, de halls immenses, dans la toiture desquels le verre est fréquemment employé.
Nous avons décrit, dans un précédent chapitre, la fabrication des vitres: pour la construction des serres et des vitrages, les feuilles de verre employées sont le plus ordinairement obtenues par le coulage et non plus par le soufflage en cylindre.
Pour couler des plaques de verre, on verse sur une table la matière en fusion; on la lamine au moyen d'un rouleau que l'on promène par dessus, soutenu par des tringles d'une hauteur égale à l'épaisseur que l'on vent donner à la feuille.
On peut obtenir par ce procédé des vitres cannelées, présentant des dessins de tout sorte sur leur surface, en coulant la matière en fusion sur des tables où l'on a gravé en creux les dessins que l'on veut reproduire. Ou mieux encore, on se sert de tables places et on lamine le verre au moyen de cylindres gravées. On obtient ainsi des effets fort décoratifs.
Par le coulage, on arrive à fabriquer, il va sans dire, des plaques de verre beaucoup plus épaisses, beaucoup plus résistantes que per le soufflage. Cépendant, le solidité des vitres coulées n'est pas encore tellement grande que celles-ci soient à l'abri de tout accident. Depuis longtemps on a cherché le moyen de construire des vitrages qui ne fussent pas exposés à se briser au moindre choc. MM. Bécoulet et Bellet ont essayé de résoudre le problème en interposant, entre deux plaques de verre, un treillis métallique. M. Appert a été plus loin encore dans cet ordre d'idées: il a imaginé de souder, d'amalgamer ensemble les deux feuilles, de telle sorte que le treillis fût incorporé dans la pâte même du verre et en devînt comme une partie intégrante.
Voici le moyen usité en pareil cas: on roule le treillis autour d'un cylindre. On coule sur la table une couche de verre, et on déroule en même temps le cylindre, de manière à étendre le treillis sur le verre encore mou; puis, on coule par-dessus une deuxième couche de verre. Les deux plaques s'amalgament ensemble en emprisonnant le treillis métallique.
On a donné au produit ainsi obtenu le nom de verre grillagé ou de verre armé.
Après les toitures, les planchers! C'est là que le génie de l'homme a accompli encore de véritables tours de force. On en arrive, sans y prendre garde, à marcher sur du verre, à fouler aux pieds un sol fabriqué avec du verre, tout comme du parquet ou du pavé.
N'avez-vous pas remarqué ces dallages transparents, fort usités aujourd'hui dans une foule d'établissements publics, tels qu'administrations, gares, etc.? Le soir, vous apercevez parfois de la lumière à travers. Cette substance n'est autre chose que du verre auquel une grande épaisseur donne une solidité à tout épreuve. Vous pouvez marcher dessus, sans crainte de tomber à l'étage inférieur. Parmi ces dalles, le unes sont unies, les autres garnies de dessins, de losanges, qui les rendent moins glissantes. Elles sont obtenues par le procédé du coulage.
Cette invention est très heureuse; elle permet de donner du jour à des locaux auxquels la distribution des bâtiments empèche de ménager des fenêtres. Beaucoup de sous-sols reçoivent de la lumière de cette façon.
Que dire encore de ces tuiles de verre, destinées peut-être un jour à remplacer les ardoises pour la couverture des maisons? Et qui sait où l'on s'arrêtera dans cette voie? On a été jusqu'à construire des cheminées en verre. Oui, cher lecteur, et ce n'est pas là une plaisanterie. A Douai, une maison importante a essayé dernièrement l'installation de cheminées faites d'une sorte de résidu qui coule continuellement des hauts-fourneaux, que l'on nomme laitier, et qui est au fond une sorte de verre noir. Cette matière n'avait jamais été jusqu'alors employée dans aucune industrie. Les cheminées en laitier ont l'avantage de ne pas coûter cher et d'être plus legères que les autres.
Les façades, les toitures, les planchers, les cheminées, le verre a tout envahi dans la construction. Pourquoi ne pas bâtir alors des maisons entières, des habitations avec du verre? Hum! cela pourrait avoir des inconvénients. Il y a tant de curieux en ce monde!.. Et pourtant cette idée a déjà germé dans plus d;un cerveau. J'ai là sous les yeux le plan d'une maison tout en verre, conçu par M. Garnier, le célèbre architecte dont l'Exposition de 1889 a su si bien mettre à profit le génie inventif.
Il ne s'agit plus ici de constructions légères, comme les serres, ou fantaisistes comme le Palais de Cristal. L'architecte a songé à faire une maison véritable, pouvant servir à l'habitation, et offrant tout le confortable exigé par les besoins modernes. Il ne suffit donc plus que les murs soient formés par de simples vitres; le solidité en serait trop douteuse et trop facilement compromise.
Briques en verre soufflé
Briques en verre soufflé
M. Garnier emploie de véritables briques de verre, très solides, soit soufflées, soit constituant des blocs compacts. Ces pierres transparentes sont assemblées ensemble, au moyen de mastic, dans une grande armature de fer qui forme la charpente de la maison.
On dispose les pierres en deux parois, de façon à laisser un vide intermédiaire, dans lequel sont ménagés les conduits servant soit à l'adduction des eaux, pour les usages des locataires, soit au déversement des eaux ménagères. C'est également dans cet espace que sont logés les fils électriques pour les sonnettes, le téléphone, etc.
On peut aussi tirer un parti fort heureux de ce vide ménagé entre les parois, pour rafraichir la maison en été et la chauffer en hiver. Dans la mauvaise saison, on y fait circuler de l'air chaud. En été, on y introduit de l'air comprimé, qui, en se détendant, produit en grande fraîcheur.
Un médecin hollandais, le docteur Van der Heyden, a, paraît-il, construit au Japon une maison en verre. Il est probably que c'est le premier essai tenté en ce genre. Quel en est le plan, je ne saurais le dire; mais ce qu'il y a d'intéresant à signaler, c'est le parti qu'il a su tirer de d'espace compris entre les cloisons des murailles, pour empêcher le soleil, en été, de venir chauffer l'intérieur des appartements. On sait que les solutions salines ont la propriété de laisser passer les rayons lumineux, et d'exclure les rayons caloriques. Notre docteur a rempli les vides de sa maison d'une solution saline, afin de la rendre invulnérable aux rayons solaires.
Quel est l'avenir réservé à la maison de verre? Le verra-t-on un jour se généraliser, ou bien restera-t-elle, comme tant d'autres inventions humaines, à l'état de théorie? Nul ne saurait le dire. On ne peut méconnaître cependant que de pareilles habitations présenteraient de très grands avantages au point de vue de l'hygiène. Le verre est facile à nettoyer; et les impuretés d'ailleurs, gràce à la transparence de la matière, pourraient aisément se reconnaître. Dans les pays chauds, la maison de verre rendrait des services appréciables.
Avant d'abandonner le rôle du verre dans l'architecture proprement dite, nous devons signaler en quelques mots sons invasion dans l'intérieur même de nos habitations, dans l'ameublement et l'ornementation de nos appartements.
Grâce aux nouveaux procédés de moulage en usage de nos jours à Saint-Gobain, et que nous avons décrits dans un précédent chapitre, on est arrivé à fabriquer avec du verre une foule d'objets d'usage domestique, tels que des tables, des guéridons, des dessous de plat, etc. Le verre, comme chacun sait, se prête admirablement à toutes les fantaises du moulage; et ces mille et mille articles, rehaussés par le dorure, l'argenture et la décoration, offrent souvent un aspect fort séant à l'œil et d'allure vraiment artistique.
Le verre envahit tous les domaines: s'il continue, il n'existera plus au monde, pour l'usage de l'homme, d'autre substance que lui. Figurez-vous que l'on a été jusqu'à fabriquer avec du verre... des rideaux!
Des rideaux en verre? allez-vous me répondre. Mais quoi de plus simple? On fait bien du verre filé avec lequel on tisse des étoffes. Pourquoi n'en fabriquerait-on pas aussi bien du tulle ou de la mousseline? Des rideaux en mousseline de verre filé seraient assurément fort brillants d'aspect!
Vous n'y êtes pas; il ne s'agit pas ici de verre filé ces rideaux nouveau modèle sont faits de vrais morceaux de verre, de tout petits carreaux, blancs ou colorés, enchâssés chacun dans du zinc, et reliés ensemble, à leurs angles, au moyen de crochets minuscules.
Ces carreaux ne doivent pas naturellement être soudés ensemble; il faut qu;ils soient mobiles, afin que l'on puisse gracieusement relever le rideau, ménager tous les plis désirables.
Sont-ils, ces rideaux, d'un usage fort répandu? Non, sans doute. Dame Mode qui est un grand tyran ne les a pas encore imposés par un de ses décrets irréformables. C'est peut-être dommage. Ces rideaux sont d'un effet très pittoresque dans les vestibules ou les salles à manager. Colorés, ils tamisent fort heureusement le jour et ressemblent à des vitraux. Ils présentent en outre un avantage fort appréciable; c'est de se nettoyer facilement. Ils auraient peut-être pour ennemis les blanchisseurs; à coup sûr ils pourraient compter comme amis les hygiénistes, qui one souvent critiqué la mode des rideaux et des tentures d'appartements, comme étant des nids à microbes, renfermant toutes les maladies dans leur plis gracieux.